Attentat hyper casher: naturalisation française pour un Malien musulman pour avoir sauvé des juifs

La France a décidé d’accorder la naturalisation à un employé malien musulman du supermarché casher attaqué à Paris, Lassana Bathily, qui a sauvé il y a une semaine des juifs pris en otages par le jihadiste Amédy Coulibaly.
« Au lendemain de l’acte de bravoure de M. Lassana Bathily, né en 1990 à Bamako (Mali), lors de la prise d’otage du magasin « Hyper Casher » le 9 janvier dernier, le ministre de l’Intérieur a demandé l’instruction en urgence de la demande de naturalisation qu’il avait déposée le 7 juillet 2014 », indique un communiqué des services de Bernard Cazeneuve.
« M. Bernard Cazeneuve présidera en son honneur une cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française mardi 20 janvier », ajoute le communiqué.

"J’ai pas caché des juifs, j’ai caché des êtres humains", a raconté jeudi à l’AFP Lassana Bathily. Le jeune homme a le regard chagrin. Il ne veut pas parler de ses frères, de sa famille, du terme "héros" qu’on lui jette au visage. "Peut-être, je ne sais pas. Je suis Lassana, j’ai sauvé des gens. Je ne vais pas prendre la grosse tête".

Les messages de félicitations venus du monde entier, les "bravo, t’es un héros" et le coup de fil du président français François Hollande n’y font rien : depuis ce vendredi 9 janvier, le jeune Malien n’est "pas très bien". "Je suis triste. Un ami est parti et il était très jeune". Il parle de Yohan Cohen, 20 ans, son collègue. Un des quatre juifs tués par Amédy Coulibaly, d’origine… malienne.

– "Venez, venez !" –

Lassana Bathily, visage doux cadré par une barbichette noire, est musulman pratiquant. Il travaille depuis quatre ans dans ce supermarché casher de l’est parisien "avec des juifs et d’autres musulmans".

Le jihadiste a été abattu par la police qui a libéré tous les otages – juifs, musulmans, catholiques – qu’il y retenait.

Vendredi de la semaine dernière, Lassana Bathily était arrivé à 07H00 GMT, une demi-heure avant l’ouverture, le temps de laver le sol. A 11H55 GMT, le jeune homme fluet est en train d’ouvrir la porte d’une chambre froide au sous-sol pour y stocker une palette de marchandises quand des coups de feu claquent "en haut".

"J’ai tout de suite pensé à Charlie Hebdo".

Dans la minute, "je vois tout le monde descendre en criant". Dix, quinze personnes. "Je leur dit +venez, venez !+". Il cache un groupe dans la chambre de congélation. Un autre dans la chambre dédiée au "frais". Une femme se dissimule dans des toilettes, elle y restera quatre heures, jusqu’à l’assaut final, dit-il.

Dans sa chambre froide, les otages lui demandent "s’il y a une issue de secours. Je leur dis qu’il y a une possibilité : le monte-charge". Un grand monte-charge assez large pour accueillir tout le groupe.

Il mène au rez-de-chaussée, là où se trouve le preneur d’otages. "A 1,50 m, il y a une porte de secours où on peut se sauver", leur dit-il. "Ils n’ont pas voulu", ça va faire du bruit, le preneur d’otages pourrait les cueillir. "Je n’ai pas insisté".

A ce moment-là, une collègue du Malien descend, missionnée par Amély Coulibaly pour faire monter tout le monde. Le groupe refuse. Lassana Bathily sent qu’il faut bouger, "vite".

– "Restez calmes !" –

"J’ai éteint le froid et je leur ai dit : +Restez calmes ! Moi je vais partir+", raconte-t-il. Puis, "j’ai appuyé sur le bouton du monte-charge" qui était un étage au-dessus. "Quand il est arrivé, j’ai cru que (Coulibaly) était dedans".

Mais le monte-charge est vide. Pendant la remontée de l’appareil, "J’ai prié que Dieu me sauve". Là-haut, "j’ai ouvert la porte et je suis sorti en courant".

La sortie subreptice du Malien affole les policiers, qui hurlent en sa direction. "J’ai peur et je n’ai pas peur", dit-il. Des policiers le mettent en joue, mais "je sais que je ne suis pas menaçant". Il se couche par terre, les mains sur la tête.

Il aide ensuite les policiers d’élite à dessiner le plan de la supérette. Avant d’assister à l’assaut, à quelques mètres de distance, enveloppé dans une couverture de survie dorée de la Croix-Rouge.

Le soir, il arrive à une heure du matin dans son foyer de travailleurs migrants du nord de Paris. Ses amis l’acclament.

Dimanche, François Hollande l’appelle : "Vous avez été courageux". Le Malien raconte son histoire, puis les deux hommes parlent de la nationalité française. Le président lui promet d’intervenir.

Lassana Bathily a obtenu une carte de séjour en 2011, cinq ans après son arrivée sur le territoire français. "La France est un beau pays où tu peux vite t’intégrer", estime d’ailleurs cet amateur de football.

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