Arabie/diplomatie: l’inamovible Saoud Al-Fayçal jette l’éponge après 40 ans

L’inamovible ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud Al-Fayçal, a fini mercredi par jeter l’éponge après avoir conduit pendant 40 ans la diplomatie du géant pétrolier à travers une succession de crises régionales.

Agé de 75 ans, le prince Saoud a été relevé de ses fonctions à sa demande "pour raisons de santé" et remplacé par l’ambassadeur saoudien à Washington Adel al-Jubeir, a annoncé le cabinet royal. Il a néanmoins été nommé conseiller et émissaire spécial du roi Salmane.

Son départ intervient dans un contexte de vives tensions régionales, marqué par l’engagement du royaume saoudien dans deux opérations militaires : l’une est dirigée directement par Ryad contre la rébellion chiite au Yémen, et l’autre est conduite par les Etats-Unis contre le groupe Etat islamique (EI) qui sévit en Syrie et en Irak.

Seul ministre des Affaires étrangères au monde à être en poste depuis aussi longtemps, le prince Saoud, qui a servi sous quatre rois, souffre de multiples problèmes de santé. Il a des difficultés pour marcher et parler.

Nommé à la tête du ministère en octobre 1975, sept mois après l’assassinat de son père, le roi Fayçal, par un neveu, le prince Saoud a joué un rôle de premier plan dans les efforts ayant mis fin à la guerre civile au Liban (1975-1990), notamment pour la conclusion en 1989 de l’accord de Taëf (Arabie).

Ce diplomate chevronné a dirigé la politique étrangère saoudienne durant la guerre Irak-Iran (1980-1988), puis l’invasion irakienne du Koweït (1990) et la guerre du Golfe qui suivit (1991) et aboutit à la libération de l’émirat par une coalition internationale dirigée par les Etats-Unis et basée en Arabie saoudite.

La violence confessionnelle qui ravagea l’Irak après l’invasion de ce pays par les Etats-Unis en 2003 — pour laquelle Ryad avait refusé que l’armée américaine utilise le territoire saoudien — amena le prince à critiquer de plus en plus ouvertement la politique de l’administration de George W. Bush dans la région.

Les relations saoudo-américaines avaient déjà été mises à rude épreuve par les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, dont 15 des 19 auteurs étaient Saoudiens.

"sur la défensive face à l’Iran"

Le prince, qui visitait fréquemment Washington et recevait régulièrement des responsables américains en Arabie, entretenait aussi des rapports étroits avec de nombreux dirigeants européens.

Il a activement contribué à la relance, en mars 2007, d’un plan de paix arabe avec Israël d’inspiration saoudienne, cinq ans après qu’il a été adopté.

Le prince Saoud est cependant considéré comme un partisan de la prudence vis-à-vis d’Israël: il estime que toute relation avec l’Etat hébreu est tributaire d’un règlement de ses conflits avec les Palestiniens, la Syrie et le Liban, sur la base d’un retrait des territoires arabes occupés.

Ce prince, qui troque souvent sa longue robe traditionnelle pour d’élégants costumes durant ses missions en Occident, s’est retrouvé ces dernières années sur la défensive face à l’Iran. Téhéran a repris langue avec les Etats-Unis et élargi son influence en Syrie, en Irak, au Liban et, plus récemment, au Yémen où il soutient la rébellion.

Sur les réseaux sociaux, nombre de Saoudiens ont salué la longue carrière diplomatique de Saoud Al-Fayçal. "Aucune affaire ne sera tranchée sans que l’on revienne vers vous", a écrit Mohamed Abdallah, alors que Lamia Baachen a estimé que, par sa persevérance, le prince Saoud "rend difficile la mission de son successeur".

Né en 1940 dans la région montagneuse de Taëf, le prince Saoud a obtenu en 1964 un diplôme d’économie de l’université de Princeton (Etats-Unis).

Il a ensuite travaillé pour la compagnie pétrolière publique Petromin, puis au ministère du Pétrole, dont il est devenu sous-secrétaire d’Etat en juin 1971.

Marié, le prince Saoud a trois garçons et trois filles.

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