Algérie/Affaire El Khabar: la défense se retire en signe de protestation contre « un simulacre » de procès

Les avocats du groupe de presse algérien El Khabar ont annoncé, mercredi, leur retrait de l’affaire du rachat du groupe par un homme d’affaires en guise de protestation contre « un simulacre » de procès.

Lors d’une conférence de presse à Alger, les représentants du collectif ont confié que la quarantaine d’avocats constituant la défense ont décidé de se retirer car, ils sont "convaincus qu’il était vain de continuer à travailler sur une affaire politique par excellence".

Ils ont relevé que le ministre algérien de la Communication "n’a pas le droit d’intenter une action en justice contre un journal. L’autorité de régulation de la presse est seule habilité à le faire".

Les avocats reviennent également sur les vices de forme constatés tout au long de la procédure en référée introduite par le ministre en question pour invalider le rachat du groupe de presse El Khabar par l’industriel Issad Rebrab qui se dit "traqué par le régime".

Le ministère a jugé la transaction "illégale", car "contraire" aux dispositions sur le monopole contenues dans la dernière loi organique sur la presse. Ces dispositions interdisent notamment à un même groupe ou personne, de détenir plus de deux journaux. Or, Rebrab est déjà propriétaire du journal francophone Liberté.

Contestant ces arguments, la défense avait relevé que des hommes proches du pouvoir sont propriétaires de nombreux médias sans être jamais inquiétés.

Après plusieurs renvois, le tribunal administratif d’Alger a gelé, mercredi dernier, le rachat du groupe El Khabar par Ness-Prod, filiale de Cévital du magnat Rebrab, l’homme le plus riche du pays. Le conseil d’Etat devrait se prononcer dans le fond de l’affaire à la mi-juillet.

Le groupe El Khabar, au ton acerbe contre le régime, est composé d’un journal éponyme, la chaîne de télévision KBC, les imprimeries et une société de diffusion. Depuis plusieurs mois, les médias sont dans la ligne de mire du régime algérien, menant une véritable purge contre toutes les voix dissonantes, particulièrement celles ayant décrié la réélection du président Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat en avril 2014.

Plusieurs journaux ont déclaré être privés des annonces publiques, leur principale source de subsistance contrôlée par l’Agence nationale de l’édition et de la publicité (ANEP), chargée de la mise en oeuvre de la politique officielle dans ce domaine. La dernière séquence en date de la pourchasse des médias n’est autre que la mise sous scellés, samedi dernier, d’un studio de la chaine TV KBC servant pour l’enregistrement d’une émission satirique. Le directeur de la chaine a été arrêté et interrogé par la gendarmerie sur la location de ce studio.

Selon les autorités, le studio a été mis sous scellés dans le sillage de la fermeture de la chaîne Atlas TV en 2014, mais les responsables de la chaine affirment que le studio en question a été loué par plusieurs chaines de télévision privées, sans être interpellés.

La mise sous scellés du studio de KBC rappelle la fermeture en pleine campagne électorale pour la présidentielle de 2014, de la chaîne privée Atlas TV qui s’était distinguée par la couverture non-stop des manifestations organisées par le mouvement "Barakat" (ça suffit) contre la candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat, lors du scrutin du 17 avril prochain.

Quelques mois après, les autorités ont fermé également la chaine de télévision privée El Watan TV après la diffusion par cette dernière d’un entretien avec un ancien chef du Front islamique du Salut (FIS, dissous).

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