2016: Hillary Clinton soigne sa gauche, se démarque d’Obama

Le temps de la campagne est un temps à part en politique.

Lorsqu’elle dirigeait la diplomatie américaine, Hillary Clinton a travaillé pendant quatre ans – sans accrocs majeurs et en faisant fi des rivalités passées – avec Barack Obama. Mais les primaires montent en puissance, la candidate démocrate fait désormais entendre sa différence. Et se démarque, par touches successives, du président qu’elle espère remplacer.

D’ici le 8 novembre 2016, date de la prochaine élection présidentielle américaine, les échanges pourraient devenir plus vifs.

La Syrie ? Il faudrait en faire plus. Les forages en Arctique au large de l’Alaska ? Nous ne pouvons prendre le risque. La construction de l’oléoduc Keystone XL entre les Etats-Unis et le Canada ? Les délibérations ont trop traîné, l’heure est venue de dire non. Le contrôle des armes à feu ? Il faut aller plus vite, en se passant du Congrès si nécessaire.

Mercredi, Mme Clinton a franchi un pas supplémentaire en se prononçant contre un dossier emblématique de la présidence Obama: l’accord de libre-échange Asie-pacifique, conclu lundi entre 12 pays (du Canada au Chili en passant par le Japon et l’Australie) à l’issue de sept années de négociations.

Au moment où elle est inquiétée par le sénateur du Vermont Bernie Sanders, qui a surpris les analystes en la talonnant dans plusieurs Etats cruciaux, la candidate donne des gages à l’aile gauche de son parti. Quitte, comme cela s’est vu par le passé, à donner un coup de barre au centre une fois l’obstacle des primaires passé.

Mais cet exercice d’équilibriste pourrait aussi laisser des traces.

A la tête du département d’Etat (2009-2013), Mme Clinton avait défendu l’intérêt économique de ce partenariat transpacifique (TPP), sillonnant la région Asie-Pacifique pour en louer les mérites.

L’un de ses rivaux, l’ancien gouverneur du Maryland Martin O’Malley, qui dénonce de longue date un projet "mauvais pour la classe moyenne", a ironisé sur ce changement de pied soudain. "Ce que je peux vous dire c’est que le regard que je portais sur ce dossier il y a huit mois n’a pas changé à la veille des débats".

Ces revirements – au moins partiels – sont périlleux. Car le talon d’Achille de cette candidate souvent perçue comme trop calculatrice est précisément la méfiance qu’elle suscite. Selon un récent sondage de Quinnipiac University réalisé dans les trois Etats-clé que sont la Floride, l’Ohio et la Pennsylvanie, moins de 40% des électeurs jugent qu’elle est "honnête et digne de confiance".

– Pas un ‘troisième mandat Obama’ –

Sur le Moyen-Orient, ses critiques étaient plus attendues: l’ancienne sénatrice a toujours revendiqué une approche plus ferme. La semaine dernière, elle s’est prononcée en faveur d’une zone d’exclusion aérienne, une idée que la Maison Blanche rejette pour l’heure, soulignant qu’elle a des implications lourdes sur le long terme.

Interrogé en fin de semaine dernière sur cette différence d’analyse, M. Obama n’a pu s’empêcher de décocher une flèche à son ancienne rivale de 2008. Ironisant à demi-mots sur les promesses de campagne pas toujours suivies d’effets, il a rappelé qu’il existait une différence de taille entre "être candidat à la présidence et être président".

"Je pense qu’Hillary serait la première à reconnaître que lorsque vous êtes dans le siège qui est le mien, dans la Situation Room, l’angle de vue est un peu différent. Elle le sait d’autant mieux qu’elle était juste à côté de moi (pendant quatre ans)".

Dans ses meetings, la candidate répète à l’envie qu’elle n’est pas candidate à un troisième mandat de Bill Clinton ou de Barack Obama. "Je suis candidate pour mon premier mandat", martèle-t-elle.

Mais pour l’ex-First Lady et ex-secrétaire d’Etat, la question reste se savoir jusqu’où elle est prête à se démarquer de ces deux hommes.

Si elle arrive à trouver la bonne distance, elle pourrait écrire une page d’histoire en devenant la première femme à accéder à la présidence américaine.

Et elle ferait aussi mentir les statistiques dont les passionnés de politique américaine raffolent: depuis la Seconde guerre mondiale, aucun démocrate n’a réussi à se faire élire après deux mandats d’un président issu de son propre camp.

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